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19 juin 2012 2 19 /06 /juin /2012 22:17

Zawgyi, l'alchimiste de Birmanie
par Jak Bazino

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En novembre 1885, Mandalay, capitale du royaume de Birmanie, est prise par les Anglais. Maung Aung, garde au palais royal, est le dernier des Aris, une secte ésotérique qui veille sur le secret de la pierre philosophale. Fuyant l’invasion, il disparaît pour retrouver le Zawgyi, l’alchimiste immortel qui provoquera l’avènement d’un roi messianique et du prochain Bouddha.

En septembre 2007, Éric Tamino arrive en Birmanie au moment de la "Révolution de Safran", une révolte de moines qui entraîne une répression violente. Témoin d’un meurtre, Éric, se met en quête du sens du tatouage qu’il découvre sur la victime. Ses recherches vont le mener d’aventures en dangers, de Yangon à la "Vallée de la mort", sur les traces de Maung Aung. Poursuivi en pleine dictature militaire par des agents voulant s’emparer de la pierre philosophale avant lui, ses péripéties lui feront entrevoir l’amour, la souffrance et la mort, ainsi que le chemin conduisant à l’Illumination.

Pour en savoir plus et commander http://www.monpetitediteur.com/librairie/livre.php?isbn=9782748378351

http://books.google.fr/books/about/Zawgyi_l_alchimiste_de_Birmanie.html?id=jMPf7nVH99sC&redir_esc=y

 


 

NOTE SUR l'AUTEUR « Zawgyi, l’alchimiste de Birmanie » est son premier roman. Il est l’aboutissement de cinq années de recherches et concilie son amour du Myanmar avec celui de l’écriture.

Cet ouvrage est le fruit de cinq ans de recherches et de travail sur les alchimies birmanes, indiennes et européennes, sur le Bouddhisme ésotérique et sur l’histoire de la Birmanie.

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27 mai 2012 7 27 /05 /mai /2012 22:36

  (If you were forced to choose between the barbarians of civilization and civilized barbaris...what would you choose?)

Quant à nous, si nous étions forcés à l’option entre les barbares de la civilisation et les civilisés de la barbarie, nous choisirions les barbares. V HUGO

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"En 1793, selon que l’idée qui flottait était bonne ou mauvaise, selon que c’était le jour du fanatisme ou de l’enthousiasme, il partait du faubourg Saint-Antoine tantôt des légions sauvages, tantôt des bandes héroïques.

Sauvages. Expliquons nous sur ce mot. Ces hommes hérissés qui, dans les jours génésiaques du chaos révolutionnaire, déguenillés, hurlants, farouches, le casse-tête levé, la pique haute, se ruaient sur le vieux Paris bouleversé, que voulaient-ils ? Ils voulaient la fin des oppressions, la fin des tyrannies, la fin du glaive, le travail pour l’homme, l’instruction pour l’enfant, la douceur sociale pour la femme, la liberté, l’égalité, la fraternité, le pain pour tous, l’idée pour tous, l’édénisation du monde, le Progrès ; et cette chose sainte, bonne et douce, le progrès, poussés à bout, hors d’eux-mêmes, ils la réclamaient terribles, demi-nus, la massue au poing, le rugissement à la bouche. C’étaient les sauvages, oui ; mais les sauvages de la civilisation.

Ils proclamaient avec furie le droit ; ils voulaient, fût-ce par le tremblement et l’épouvante, forcer le genre humain au paradis. Ils semblaient des barbares et ils étaient des sauveurs. Ils réclamaient la lumière avec le masque de la nuit.
En regard de ces hommes, farouches, nous en convenons, et effrayants, mais farouches et effrayants pour le bien, il y a d’autres hommes, souriants, brodés, dorés, enrubannés, constellés, en bas de soie, en plumes blanches, en gants jaunes, en souliers vernis, qui, accoudés à une table de velours au coin d’une cheminée de marbre, insistent doucement pour le maintien et la conservation du passé, du moyen-âge, du droit divin, du fanatisme, de l’ignorance, de l’esclavage, de la peine de mort, de la guerre, glorifiant à demi-voix et avec politesse le sabre, le bûcher et l’échafaud."

Quant à nous, si nous étions forcés à l’option entre les barbares de la civilisation et les civilisés de la barbarie, nous choisirions les barbares.

EXTRAIT Victor Hugo, les misérables  Tome IV : L'idylle rue Plumet et l'épopée rue Saint-Denis

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LIEN  Les Misérables Tome IV (1890)

Page 53 du livre dispo en téléchargement  EBOOK http://www.ebooksgratuits.com/pdf/hugo_les_miserables_idylle_plumet_epopee_st_denis.pdf 

 


 

 


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27 mai 2012 7 27 /05 /mai /2012 22:31

 

« Les forces qui font aboutir le projet grandiose du bonheur parfait ne tiennent nullement compte de la souffrance d’ordre secondaire, et exterminent ces sections de l’humanité qui leur barrent le passage. (…) Qu’il soit être humain ou brut, l’obstacle doit être éliminé. » Herbert Spencer, philosophe anglais, 1850

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« Si chaque homme a la liberté de faire tout ce qu'il veut, pourvu qu'il n'enfreigne pas la liberté égale de quelque autre homme, alors il est libre de rompre tout rapport avec l'État, – de renoncer à sa protection et de refuser de payer pour son soutien [...] il a par conséquent le droit de se retirer ainsi. »

« La fonction du libéralisme dans le passé a été de mettre une limite aux pouvoirs des rois. La fonction du vrai libéralisme dans l'avenir sera de limiter le pouvoir des parlements. »

« Non seulement les socialistes, mais encore les prétendus libéraux, qui leur préparent la voie, croient qu'avec de l'adresse les défauts de l'humanité peuvent être corrigés par de bonnes institutions. C'est une illusion. Quelle que soit la structure sociale, la nature défectueuse des citoyens se manifestera dans les mauvais effets qu'elle produira. Il n'y a point d'alchimie politique à l'aide de laquelle on puisse transformer des instincts de plomb en une conduite d'or. »

 

« Les forces qui font aboutir le projet grandiose du bonheur parfait ne tiennent nullement compte de la souffrance d’ordre secondaire, et exterminent ces sections de l’humanité qui leur barrent le passage. (…) Qu’il soit être humain ou brut, l’obstacle doit être éliminé. » 

Herbert Spencer, philosophe anglais, 1850 .

Si vous souhaitez consulter ce livre, un clic suffit sur ce lien

  Le Droit d'ignorer l'État

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25 mai 2012 5 25 /05 /mai /2012 09:19

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(The wild woman, more blue beard, credit card ... the call of the wild sense!)

« fouilles psycho-archéologiques » des ruines de l’inconscient féminin...

La femme qui récupère sa nature sauvage est comme les loups. Elle court, danse, hurle avec eux. Elle est débordante de vitalité, de créativité, bien dans son corps, vibrante d’âme, donneuse de vie. Il ne tient qu’à nous d’être cette femme-là.

Femmes qui courent avec les loups – Clarissa Pinkola Estés

Résumé :

Histoires et mythes de l’archétype de la Femme Sauvage
Chaque femme porte en elle une force naturelle riche de dons créateurs, de bons instincts et d’un savoir immémorial.
Chaque femme a en elle la Femme Sauvage. Mais la Femme Sauvage, comme la nature sauvage, comme l’animal sauvage, est victime de la civilisation. La société, la culture la traquent, la capturent, la musellent, afin qu’elle entre dans le moule réducteur des rôles qui lui sont assignés et ne puisse entendre la voix généreuse issue de son âme profonde. Pourtant, si éloignées que nous soyons de la Femme Sauvage, notre nature instinctuelle, nous sentons sa présence.
Nous la rencontrons dans nos rêves, dans notre psyché. Nous entendons son appel. C’est à nous d’y répondre, de retourner vers elle dont nous avons, au fond de nous, mêmes, tant envie et tant besoin. De par sa double tradition de psychanalyste et de conteuse, Clarissa Pinkola Estés nous aide à entreprendre la démarche grâce a cet ouvrage unique, parcouru par le souffle d’une immense générosité. A travers les « fouilles psycho-archéologiques » des ruines de l’inconscient féminin qu’elle effectue depuis plus de vingt ans, elle nous montre la route en faisant appel aux mythes universels et aux contes de toutes les cultures, de la Vierge Marie à Vénus, de Barbe Bleue à la Petite Marchande d’allumettes.
La femme qui récupère sa nature sauvage est comme les loups. Elle court, danse, hurle avec eux. Elle est débordante de vitalité, de créativité, bien dans son corps, vibrante d’âme, donneuse de vie. Il ne tient qu’à nous d’être cette femme-là.

Parution : 19/05/2003
Editeur : Grasset
ISBN : 2-246-49851-1
EAN13 : 9782246498513
Format : 15 cm x 24 cm
Nb pages : 487


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22 mai 2012 2 22 /05 /mai /2012 15:10

  • On y 
disserte de la nature de la démo
cratie, et surtout des deux dangers 
auxquels elle est par nature confrontée le despotisme et la démagogie, 
~ le mélange des deux étant incarné, 
~ selon l'auteur par le régime de  Napoléon III. On y évoque aussi le problème du  suffrage, à une époque où il n’était pas évident qu’il soit universel (il l'est aujourd'hui en principe, sinon en réalité). 

 

La grande paralysie

En 1868, « la France 
nouvelle», l'essai 
d'Anatole Prévost- 
Paradol, fit grand bruit. 
Depuis, ce testament 
politique qui ausculte 
les maux du pays et ses institutions

n' a pas pris une ride.

PAR MARIN DE VIRY

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Depuis la Révolution, la 
société est démocratique 
mais le pouvoir ne l'est 
pas comment les réconcilier ? Cela n'est pas le 
résumé d'un essai publié à l'occa
sion de la campagne présidentielle, 
mais le constat central d'un livre 
paru en 1868, la France nouvelle, qui 
fit sensation, le second Empire finissant. C'est la France de Thiers, de 
Gambetta et des légitimistes, mais 
c'est la nôtre, indiscutablement.

Un mot sur l'auteur, répondant 
au doux nom d Anatole Prévost- 
ParadoI. C'est une sorte de météorite 
tragique, d'équivalent dans la vie 
réelle du Lucien de Rubempré de 
Balzac un journaliste aussi ambi
tieux que brillant qui finit par se 
suicider, lavant un honneur qu'il 
croyait perdu par son ralliement 
à un second Empire sur le déclin, 
qu'il avait d'abord combattu au 
nom de principes libéraux. Prévost- 
Paradol naît en 1829 et mène une 
carrière d'« éditorialiste d'opposi
tion», dirait-on aujourd'hui, dans la 
crème des périodiques de l'époque, 
du Journal des débats à la Revue des 
deux mondes. Il rate son entrée en 
politique, en se faisant battre deux 
fois aux élections législatives, mais 
il est élu à l'Académie française en 
1865. Il se ralliera définitivement 
au second Empire sur sa fin, en se 
laissant nommer ministre plénipotentiaire aux Etats-Unis.

A peine arrivé à Washington, problème du suffrage, à une époque 
l'empire s'effondre et il prend 
conscience que, étant considéré  comme un traitre par ses anciens compagnons d’opposition  au régime. Il est décrédibilisé  et sans avenir sur le plan politique. Il se tire une balle dans le cœur, il a 41 ans. Comme le fait remarquer Gabriel de Broglie, qui présente cet ouvrage, si il avait été plus plastique avec sa propre conscience, il aurait tranquillement participé à la rénovation de la vie politique après l’effondrement du régime. Mais la viscosité morale n’avait pas encore fait les progrès qu’on connaît.

La lecture de la France nouvelle 
est utilement désespérante, car 
l'énoncé des maux politiques qui frappaient notre pays en 1868 n’a pas pris une ride, ou si peu. Dans les sujets politiques traités, il n’y a guère que la question religieuse, 
alors en plein débat sur la sépa
ration de l'Eglise et de l'Etat, qui 
soit à peu près résolue. Même les 
questions de politique étrangère, 
marquées alors par la « politique 
des nationalités »; c'est-à-dire le 
soutien que Napoléon III apportait 
aux mouvements nationaux d'éman
cipation, notamment italien, pour
raient trouver une correspondance 
aujourd'hui :  faut-il payer de boule
versements géopolitiques potentiel
lement dangereux pour nos intérêts 
le soutien à des mouvements qui 
ont notre sympathie politique?

Science politique appliquée

Dans ce livre, tout est passé en 
revue, avec ce mélange de penchant 
pour le pragmatisme angle-saxon 
et de modération réformatrice qui 
caractérise le libéralisme de l'au
teur. C'est un ouvrage complet de 
science politique appliquée. On y 
disserte de la nature de la démo
cratie, et surtout des deux dangers 
auxquels elle est par nature confrontée le despotisme et la démagogie, 
~ le mélange des deux étant incarné, 
~ selon l'auteur par le régime de  Napoléon III. On y évoque aussi le problème du  suffrage, à une époque où il n’était pas évident qu’il soit universel (il l'est aujourd'hui en principe, sinon en réalité). On y débat enfin de décentralisation, du rôle législatif des chambres, de l'exécutif et de sa responsabilité politique. Les chapitres les plus savoureux sont ceux qui décrivent l'état lamentable de la magistrature et de la presse, oscillant entre une sujétion tremblante et une émancipation débridée ... 1868 ou 2012?  Comme toute pensée qui touche  aux points sensibles de la société française sans convoquer des solutions radicales, cet ouvrage est tombé dans l’oubli. A réparer d’urgence. Tant pour le style magnifique que pour la double désacralisation  

de la tradition et du progrès, si rare dans notre paysage intellectuel.

 

28 avril au 8 mai 2012 1 Marianne 1 87

 

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16 mars 2012 5 16 /03 /mars /2012 12:10

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Réflexion et partage de la rédaction - 9 avril 2011

"stupeur et tremblement!"

Dans cette vallée de l'étonnement,

il fait nuit et jour à la fois..

 


 

Dans l' histoire de la conférence des oiseaux, Attar parle des oiseaux qui sont parti à la recherche de leur roi oublié.

Apres des épreuves terribles,, ils arrivent à l'avant dernière vallée qui est la vallée de où ils sont pris de stupeur.

Car dans cette vallée, il fait noir et jour à la fois, il fait chaud et froid à la fois, on voit et on ne voit pas, on est, et on n'est pas à la fois. !

Les choses existent, les choses n'existent pas..

C'est la vallée de la contradiction.

La vallée où le mental est en déroute parce qu'il est mis devant des contradictions.

Effectivement, cette vallée est un peu ce qui se passe aujourd'hui,  les contradictoires se présentent à nous, non pas pour s'annihiler, non pas pour s'auto détruire, mais pour coexister dans une réalité plus haute, plus grande, dans cet infiniment conscient que nous devons développer pour faire changer notre monde.


La Conférence des oiseaux ... un livre nourricier!

Farid-ud-Din’ Attar

On ignore presque tout de sa vie. On sait seulement qu’il est né à Nichãpur, en Perse, probablement en 1140, qu’il fut apothicaire, qu’il voyagea beaucoup et qu’il mourut en 1230, dans sa quatre-vingt-dixième année.

 

La conférence des oiseaux

 

Farid-ud-Din’ Attar fut l’un des plus grands poètes mystiques de cette époque glorieuse du soufisme où la quête divine atteignit des sommets inégalés. Rûmi, Hallaj, Saadi furent ses pairs.

Il écrivit beaucoup. Le Mémorial des saints, le Livre divin sont de ses œuvres majeures. La Conférence des oiseaux est assurément la plus accomplie. Elle relate le voyage de la huppe et d’une trentaine de ses compagnons en quête de Simorgh, leur roi. D’innombrables contes, anecdotes, paroles de saints et de fous les accompagnent. « Lis ce livre, chercheur, tu sauras où aller, dit le prophète. Savoure-le longtemps et tu seras nourri. Car il a de quoi t’étonner. Tu le lis une fois et tu crois le connaître, mais non ! Lis-le cent fois, cent merveilles nouvelles ébahiront ton œil. »


Symbolique1175599471

 

Le « Langage des Oiseaux » comprend 4 647 vers.

C'est une épopée mystique où 30 000 oiseaux sont à la recherche de leur Roi.

Le récit commence par un discours de bienvenue qui constitue une fonction rituelle et magique associant la « Huppe », un oiseau, (**) porteur d'une couronne et les autres oiseaux, qui représentent une humanité cherchante.
Aussitôt, la foule des oiseaux inquiets se rassemblent et providentiellement la Huppe se présente comme messagère.
Elle exhorte les oiseaux à partir pour un voyage difficile qui les conduira à la cour de leur Roi, un oiseau fabuleux, le Simorg (ou Simurgh).

Tous les oiseaux comprennent l'intérêt fondamental de cette entreprise. Cependant presque aussitôt plus de dix mille d'entre eux s'excusent : ils sont pour des raisons diverses, content de leur sort ici-bas.
La Huppe admoneste tout le monde, tranquillise les uns, encourage les autres et commence l'enseignement qui permettra d'entreprendre le voyage.
Ils doivent s'engager dans les sept vallées qui marqueront les degrés initiatiques de leur ascension spirituelle.
Ces vallées magiques et mystiques sont : les vallées de la recherche, de l'amour, de la connaissance, de l'indépendance, de l'union, de la stupeur et du dénuement.
C'est après avoir franchi ces vallées, en un long voyage dont la durée comprend souvent une ou plusieurs vies pleines d'embûches, voyage où la grande majorité des oiseaux périront, que les rescapés se voient refuser - ultime épreuve - l'accès tant espéré au palais de leur Roi : le Simurgh.

 


 

Une autre vision, le monde quantique Cliquez ici pour voir l'article

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16 mars 2012 5 16 /03 /mars /2012 12:08
  • Parce que le vieil homme oublie tout, le fils peut lui aussi oublier leurs différends.
  • «Je suis quelqu'un qui n'a rien à annoncer. Je n'ai plus rien à faire là. » Ou encore : « Il n 'y a pas de miracle, mais des signes. » Parfois, on se croirait dans une scène du théâtre de l'absurde, comme quand le fils ,pour aider le père à s'habiller, lui tend ses chaussettes, et que le vieillard s'étonne : « Où est la troisième? » Pour Geiger, c'est une rencontre à la fois paradoxale et inespérée.
  • A un moment, il lui demande: « Mais, papa, sais-tu au juste qui je suis? » Et l'autre de répondre « Comme si c'était vraiment intéressant. »

 




QUAND L'OUBLI RESSERRE LES LIENS

Le romancier Arno Geiger raconte comment la maladie d'Alzheimer l'a paradoxalement rapproché de son père.
LE LIVRE : Der olte Konig in seinem Exil  “ vieux roi en son exil » par Ama Geiger, Carl Hanser, 2011.

« souvent, c'est comme s'il ne savait rien et comprenait tout », écrit Arno Geiger à propos de son père,  atteint de lamaladie d'Alzheimer. Sur ce sujet délicat et à bien des égards répulsif, l'Autrichien signe, après Tout sur Sally unnouveau bestseller. Le livre porte un titre shakespearien: « Le vieux roi en son exil ». Geiger yévoque le rapprochement entre son père et lui,à la faveur de la maladie. Leurs relations avaientlongtemps été conflictuelles, l'écrivain ayantmême fini par se résigner à ce que rien ne puissejamais les lier. Les manies et le laisser-aller du vieil homme l'agaçaient tout particulièrement. Jusqu'à ce que l'on découvre qu'il s'agissait des symptômes de la maladie d'Alzheimer. « Aprèsqu'il a reconnu la démence dans les tocades dupère, l'improbable a lieu, rapporte l'hebdomadaire Die Zeit. Il peut de nouveau se rapprocher de lui et la maladie l'y aide. Parce que le vieil homme oublie tout, le fils peut lui aussi oublier leurs différends. Il peut renoncer à ses réserveset redécouvrir son père. Sans jamais oublier d'écrire. Tandis que l'un ne retient plus rien,l'autre se met à tout consigner sur papier. Le père devient pour lui un matériau.»

« Nous pouvons à présent nous parler autrement, plus librement, plus agréablement, plus intelligemment », écrit Geiger, pour qui la maladie du père constitue non seulement une source d'inspiration, mais un défi. Car, dans sa folie, le vieil homme a des fulgurances, qui rendent l'écrivain presque jaloux: « Les phrases qui luivenaient n'étaient pas seulement originales, elles avaient une profondeur qui me faisait me demander pourquoi il ne m'en vient pas depareilles. Je m'émerveillais de la précision avec laquelle il s'exprimait, de la justesse de son ton, du choix de ses mots. » Ces phrases auraient pu être prononcées par « un héros de Franz Kafkaou de Thomas Bernhard ». Ainsi de ces sentences parfois sibyllines : «Je suis quelqu'un qui n'a rien à annoncer. Je n'ai plus rien à faire là. »Ou encore : « Il n 'y a pas de miracle, mais des signes. » Parfois, on se croirait dans une scène du théâtre de l'absurde, comme quand le fils, pour aider le père à s'habiller, lui tend ses chaussettes, et que le vieillard s'étonne : « Où est la troisième? » Pour Geiger, c'est une rencontre à la fois paradoxale et inespérée. A un moment, il lui demande: « Mais, papa, sais-tu au juste qui je suis? » Et l'autre de répondre « Comme si c'était vraiment intéressant. »


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16 mars 2012 5 16 /03 /mars /2012 12:04

"L’horizon est une illusion. Inaccessible, toujours attirant, jamais rencontré. Et si le plus bel horizon, le plus nécessaire en même temps que le plus frustrant, était à l’intérieur de nous-mêmes ?"

Annemarie Schwarzenbach, une étonnante voyageuse

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"Voyageuse inlassable, jamais inquiète des conditions acrobatiques ou dangereuses de ses allées et venues, confiante dans les qualités d’accueil des autres peuples, écrivant partout, elle fut d’abord ceci : une plume aux aguets, un écrivain aux marges des civilisations. Son style n’est jamais épique ou, quand il est lyrique, c’est par remuement de son âme chercheuse. Elle n’était pas croyante, elle ne fut guère heureuse, mais la lecture de ses textes donne le sentiment d’une âme éperdue dans un tunnel ponctué, au bout, par une lumière qu’elle appela, peu avant de mourir, la « félicité ».

LA-QUETE-DU-REEL_ouvrage.jpgLA QUÊTE DU RÉEL Annemarie Schwarzenbach La Quinzaine-Louis Vuitton , 322 pages , 26 € acheter

L’horizon est une illusion. Inaccessible, toujours attirant, jamais rencontré. Et si le plus bel horizon, le plus nécessaire en même temps que le plus frustrant, était à l’intérieur de nous-mêmes ? Toute l’expérience du voyage d’Annemarie Schwarzenbach (1908-1942) est dans cette insoluble contradiction : en se fuyant, on se cherche mais on ne se trouvera qu’au jour de sa mort.
En partant à la rencontre des autres, on ne fait que frôler le réel : l’insatisfaction est au bout du voyage. Le départ est rupture, le retour est rupture et chaque pérégrination baigne dans un climat de nostalgie (au sens large du mot allemand « Sehnsucht ») et d’inachevé.
Les textes rassemblés par Dominique Laure Miermont et Nicole Le Bris pour la belle collection Voyager avec…, dirigée par Maurice Nadeau, contiennent des reportages, des pages de journal intime, des extraits de correspondances et de romans, des photographies de la jeune écrivaine suisse Annemarie Schwarzenbach dont la courte vie fut essentiellement consacrée à voyager.
Fille d’un industriel zurichois richissime, elle éprouva très tôt le besoin de s’évader d’un milieu oppressant, raide et balisé. À la fois aimée par une mère possessive et condamnée par elle en raison de l’orientation homosexuelle de la jeune fille, elle mit entre la Suisse (qu’elle aimait) et elle, des étapes innombrables. Comme des écrans de protection. Mais elle revenait toujours au pays dont elle avait constamment, en route, le « mal ».
Innombrables voyages. Qu’on en juge : en moins de quinze ans elle fit un ou plusieurs séjours (souvent de plusieurs mois) aux États-Unis, à Paris, en Autriche, à Berlin, en Suède, en Finlande, en Espagne, en Turquie, en Syrie, au Liban, à Jérusalem, en Irak, en Iran, en Russie, à Majorque, dans les pays baltes, en Tchécoslovaquie, en Afghanistan, à Lisbonne, au Congo, en Angola, au Maroc… Pour finir par mourir très jeune (elle n’avait pas encore trente-quatre ans) des suites d’une chute de vélo sur sa terre natale.
A chacun de ses voyages elle adressait des reportages magnifiquement écrits à des journaux helvétiques. Ils sont marqués par une sensibilité à fleur de peau (elle y écrit souvent à la première personne) mais sans aucun cliché ou pittoresque. Elle ne fut certes pas une touriste huppée en recherche de banalités ! Annemarie Schwarzenbach est une voyageuse sensitive, au point que l’on ressent l’impression d’une âme en quête de sens, beaucoup plus qu’un corps en recherche d’impressions agréables ou d’anecdotes.
Surtout que durant, toute la période que constitue cet interminable voyage par étapes – fin des années vingt, début des années quarante – est hantée par le « nuage noir » de la montée du nazisme et de l’insécurité grandissante de la civilisation et de la culture. Et pour finir par la guerre dont elle apprend le déclenchement alors qu’elle se trouve au fin fond de l’Afghanistan.
Ces plongées sur la terre des humains sont une « quête », pour reprendre le titre donné à cet ouvrage, non pas d’une joie superficielle ou d’une gaîté mondaine, mais d’une vérité, d’un accès au réel de l’humanité. Elle y décrit des combats sociaux dans l’Amérique industrielle de l’après-crise, ou la lutte des Noirs du sud contre les restes de l’esclavagisme.
Elle s’enfonce parfois, lors de son voyage en Perse puis en Afghanistan, avant de tenter la même chose en Afrique subtropicale, dans des régions où elle croit que résident des traces, mythologiques et civilisationnelles, des débuts de l’humanité et de nos sociétés. Bien sûr, elle ne trouvera que des signes de la destruction de civilisations antérieures, devenues muettes, sans plus de mémoire que les pierres des villes disparues englouties dans les ruines des villes qui les remplacèrent.
Annemarie Schwarzenbach était morphinomane et dépressive. Ses tournées sur la terre humaine furent ponctuées d’amours passionnées et de tentatives de suicide ainsi que de cures de désintoxication dans des cliniques, notamment en Suisse. Elle vécut pour voyager, mais elle ne trouvait pas le bonheur. Constamment elle insiste sur les moments-clés d’un voyage que sont les départs et les retours.
Ces moments, toujours, provoquent en elle une mélancolie anticipatrice et une mélancolie rétrospective. Elle sait d’avance, quand elle est confrontée à un paysage, à la vision d’une chaîne de montagnes, à celle d’un fleuve immense et calme, que la richesse de ces visions sera à sa meilleure place dans les souvenirs qu’elle en conservera. Comme des trésors indicibles au fond de son cœur.
Voyageuse inlassable, jamais inquiète des conditions acrobatiques ou dangereuses de ses allées et venues, confiante dans les qualités d’accueil des autres peuples, écrivant partout, elle fut d’abord ceci : une plume aux aguets, un écrivain aux marges des civilisations. Son style n’est jamais épique ou, quand il est lyrique, c’est par remuement de son âme chercheuse. Elle n’était pas croyante, elle ne fut guère heureuse, mais la lecture de ses textes donne le sentiment d’une âme éperdue dans un tunnel ponctué, au bout, par une lumière qu’elle appela, peu avant de mourir, la « félicité ».
Et cette jeune femme étonnante, dont les récits de voyages fournirent l’essentiel de ses romans, avait usé d’une formule terrible pour résumer sa « quête » : elle avait la « nostalgie de la mort ». Troublante anticipation, tourment que les voyages, loin de l’en éloigner, l’en rapprochaient. Dans les dernières phrases de ce beau livre on trouve une formule qui résume, en 1942, sa poésie du voyage et de la vie : « Le souvenir est notre bien propre, ce à quoi nous aspirons et que nous finirons par rejoindre ».

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13 décembre 2011 2 13 /12 /décembre /2011 19:16
  •  "Ce sont des somnambules ‑ or, être moralement assoupi ne signifie pas que l'on s'aveugle. Il ne s'agissait plus, pour moi, de statuer sur eux, mais de me tenir à leurs côtés. Je les ai rejoints dans le rêve, plutôt que de le briser."

 

ENTRETIEN JONATHAN FRANZEN (article provenant du mensuel BOOKS)

 

N°271 NOVEMBRE 2011


 

freedom_2.jpgLE LIVRE  Freedom, traduit de l'anglais (États‑Unis) par Anne Wicke, Éditions de l'Olivier, 2011.

 

Jonathan Franzen

 

 

L'AUTEUR> Né en 1959 dans l'Illinois et vivant aujourd'hui à New York, Jonathan Franzen a été rendu célèbre par son troisième roman, Les Corrections, qui s'est vendu à trois millions d'exemplaires à travers le monde. Le quatrième, Freedom, lui a valu la couverture de Time, assortie du titre : « Grand Romancier américain ».

 

LITTÉRATURE «LA DIFFICULTE, VOILA L'ENNEMI! »

 


 

Dans votre recueil d'essais intitulé Pourquoi s'en faire?, vous dépeigniez la littérature comme un lieu où l'on pouvait enfin penser et exister, à l'abri du bruit d'une société régie par le consumérisme, la gadgétisation, la culture de masse. Vous l'envisagez toujours ainsi?

Oui, la littérature est un refuge, qu'il s'agisse de l'écrire ou de la lire. Pre­nons un exemple simple : j'envoie beaucoup d'e‑mails pour régler mes affaires courantes, et cette activité peut remplir ma journée. Mais tout ce que j'aurai fait, c'est passer le temps. En revanche, quand je trouve un livre qui me plaît vraiment, où je peux m'immerger, je redécouvre le temps; il s'ouvre à moi, prend une dimension nouvelle. Nous sommes nombreux à être bombardés par des stimuli multiples, confrontés à d'infinies possibilités de divertissement ‑ et à apprécier le soulagement d'un livre qui vous enveloppe et vous protège. En tant que refuge à l'écart d'un monde aliéné par la technologie, le roman s'en sortira toujours.

La difficulté, voilà l'ennemi. Assimiler la qualité à la difficulté est non seulement une erreur, mais une erreur dangereuse. Peut‑être y a‑t‑il moins à dire pour un critique sur Anna Karénine que sur Ulysse, sur La Chartreuse de Parme que sur Du côté de chez Swann. Mais c'est un débat entre des générations de critiques, non sur la qualité ou la profondeur des oeuvres. Selon moi, un écrivain a aujourd'hui pour devoir de créer des fictions à même de rivaliser avec le flot impressionnant de distractions que déverse notre époque, en faisant ce dont les autres médias sont incapables : seule l'écriture peut briser le mur entre l'intérieur et l'extérieur, nous permet de ressentir et non simplement de regarder, comme y invitent les écrans. C'est pourquoi la prose est moins sophistiquée dans mon dernier roman. J'ai renoncé à beaucoup des effets de style que je cultivais encore dans Les Corrections pour privilégier la clarté, la fluidité. J'ai voulu que la langue facilite l'accès aux histoires que je raconte et aux personnages.

 

On compare pourtant souvent Freedom aux Corrections : dans l'un comme dans l'autre, l'anatomie d'une famille renvoie à celle d'un pays ‑ les Berglund ont succédé aux Lambert et l'Amérique des années 2000 à celle des années 1990. Hormis la prose, qu'est‑ce qui les différencie?

 

Les Corrections relève, tout comme La Vingt‑Septième Ville.mon premier roman, de la satire. Écrivant une sorte de comédie réaliste, j'étais‑dans la position de celui qui possède la vérité et inflige à ses héros, leçon douloureuse sur leçon douloureuse. Et puis, l'auteur qui a écrit Les Corrections était un homme en colère, furieux contre le sort fait à la lecture et à la littérature, et donc à la singularité et la complexité, au sein d'une société abêtie par la télévision; convaincu que la machine économique détruisait à la fois l'art, la culture et la planète; désespéré par la politique et le gouvernement américains. Le roman s'est nourri de cette colère. Dans Freedom,j'ai tenté de ne pas m'ériger en juge qui regarde de haut ses personnages. Ce changement d'attitude vient aussi de ce que j'ai écrit des Mémoires, La Zone d'inconfort, dans l'intervalle séparant les deux ouvrages. J'y évoquais mon adolescence et ma famille en tâchant d'avoir un ton ironique, assez moqueur, vis‑à‑vis de moi‑même. Ce texte m'a amené à revisiter le passé. Je me suis alors aperçu que mes parents ne correspondaient pas le moins du monde à l'image que je m'en étais faite. Examinant nos rapports avec plus de recul et d'objectivité,j'ai vu que contrairement à ce que je croyais ils n'avaient jamais été des obstacles ou des freins, mais des soutiens. C'étaient d'excellents parents, et ce n'est qu'après leur mort que je l'ai compris. Cela m'a désolé, tout en m'ôtant nombre de certitudes qui étaient en réalité des préjugés. Les Corrections était un drame de l'illusion sur soi. Denise, Chip, Gary, tout comme leurs parents, Alfred et Enid, se mentent à eux‑mêmes comme ils mentent aux autres, sur ce qu'ils sont et ce qu'ils veulent, sur leurs motivations et leur identité, qu'elle soit sexuelle, professionnelle, familiale... Ce nest pas le cas de Freedom: j'ai imaginé ma fiction comme un rêve dont les héros commettent des erreurs parce quils ne sont pas éveillés. Ce sont des somnambules ‑ or, être moralement assoupi ne signifie pas que l'on s'aveugle. Il ne s'agissait plus, pour moi, de statuer sur eux, mais de me tenir à leurs côtés. Je les ai rejoints dans le rêve, plutôt que de le briser.

 

 

 

Êtes‑vous d'accord avec les critiques qui ont qualifié Freedom de roman du XIX' siècle?

 

Pas vraiment. Je suis allé à l'école des modernistes, de ces écrivains du xxe siècle qui ont questionné le concept même de roman, sa construction, ses principes fondateurs ‑ l'histoire, la narration, le personnage ‑, et nombre de thèmes et de problématiques abordés dans Freedom en témoignent Prenez, par exemple, la psychologie des personnages : elle a radicalement changé depuis le xix° siècle, ne seraitce qu'avec l'irruption des théories de Nietzsche et de Freud, qui ont révolutionné la façon dont nous lisons le comportement humain. De même, la forme a pris énormément d'importance. Je ne dis pas que les auteurs du xixe siècle n'ont rien créé en termes de style, de structure ou d'outils narratifs, mais leur perspective était différente: le roman de l'époque était l'équivalent de la télévision aujourd'hui. Tandis que les écrivains modernistes ont vécu le travail de la forme comme une crise personnelle, existentielle presque. Ils n'ont cessé de l'interroger, de faire des expériences ‑ du flux de conscience au rendu du temps chez Proust, par exemple ‑ pour essayer d'obtenir de nouveaux effets, différents de ceux produits par les moules et schémas précédents. Il y a eu un réalisme avant les modernistes, et un réalisme après. Celui de Freedom n'a rien à voir avec celui du roman du xixe siècle. Seul mon souci d'accessibilité peut justifier cette comparaison. Je voulais que le livre ne pose aucune difficulté de lecture. Mais, même si je ne me suis pas lancé dans une entreprise d'inventivité formelle et linguistique débridée, je continue de me situer dans la mouvance des modernistes.

 

Votre ambition a à voir avec celle du roman total : à travers quelques trajectoires individuelles, vous ouvrez des fenêtres sur une multitude de domaines, du basket de haut niveau aux trafics d'une société de mercenaires, du rock undergound à la préservation des oiseaux...

 

Le livre aborde nombre de thématiques sociales et culturelles : ce qu'il est advenu des baby­boomers, les relations entre générations, la surpopulation et les questions environnementales, le désarroi né du succès artistique... Mais il ne s'agissait pas d'un dessein affiché. Mon idée n'était pas de faire un grand roman social devant traiter de tel ou tel sujet. J'ai abandonné cette ambition au

moment où je travaillais sur Les Corrections, comprenant que je ne devais pas m'arrêter à l'obsession de pourfendre à tout prix la consommation technologique et la culture de masse. Vouloir à toute force écrire un livre qui aurait ce motto pour seul horizon ne pouvait que conduire à un état dépressif et artistiquement stérile. C'était une erreur que de procéder suivant cet ordre. Il me fallait avant tout imaginer des personnages, les travailler jusqu'à leur donner l'épaisseur de la vie, les insérer dans une intrigue et les rendre suffisamment attachants pour qu'on ait envie de cheminer avec eux. Le reste suivrait. Et, de fait, le discours social et culturel s'est greffé sur eux de manière naturelle. Il est venu facilement, car je suis issu d'une famille qui a toujours aimé discuter, affirmer et confronter ses opinions. J'ai ainsi pu jeter une passerelle entre mes préoccupations personnelles, comme être humain et comme citoyen, et la peinture de réalités de l'Amérique des années 2000, prise entre deux guerres, les problèmes écologiques, un sentiment d'impuissance politique...

 

Pourquoi avoir choisi le prisme de la famille pour aborder ces réalités?

 

Nous vivons dans un monde de consommation postmoderne, où les seules allégeances qui subsistent sont finalement celles faites aux marques. Nous sommes libres de choisir, libres d'aller et venir, sans appartenance. Notre monde est celui du libre marché, du mouvement perpétuel de la société capitaliste. Au sein de cet univers ins­table, mû par l'illusion de pouvoir se réinventer sans cesse, en changeant d'identité comme on change de chemise, la famille est sans doute le seul ancrage qui demeure. C'est un repère, donc quelque chose d'intéressant dans une perspective romanesque : elle est un point fixe autour duquel s'ordonne le reste du monde. Par ailleurs, c'est un thème universel. Écrire sur un romancier, disons, exclurait d'emblée beaucoup de lecteurs... Ce n'est pas le cas lorsqu'on met en scène les errements d'une mère au foyer et ses rapports avec son fils et son époux. Une sorte de pulsion égalitaire a donc aussi présidé au choix de la famille comme focale.

 

La littérature est‑elle à vos yeux le lieu d'où l'on peut réfléchir au monde, tenter de l'appréhender, avant d'y retourner?

 

Je ne sais pas si “ apprehender” est le bon terme. Quand je lis un roman comme L'Agent secret de Conrad, je m'aperçois qu'il avait tout dit sur la psychologie d'un terroriste. Je n'ai pas besoin d'être hystérique à propos du terrorisme au je siècle, car il y a cent ans, quelqu'un écrivait déjà sur ce même phénomène, et en avait rendu compte de manière admirable; de même que Kafka sait comme nul autre parler de l'impossibilité de savoir si on est, ou non, une bonne personne... La littérature ne m'aide pas à appréhender ou comprendre le monde dans lequel je vis, mais elle me donne le sentiment qu'il existe un ordre, que quelque chose fait sens. Les livres et les écrivains ne résolvent pas les problèmes pour vous mais ils vous disent que vous n'êtes pas seul. Aujourd'hui nombre de personnes sont obsédées par les apparences la présentation de soi; la société est mue par un exhibitionnisme décomplexé. Pourtant, beaucoup de gens éprouvent de la honte et, pour un romancier, se pencher sur cette honte, l'explorer, la travailler, comme je le fais dans Freedom, ne signifie pas l'abolir, mais la traiter de manière à la soulager. Le monde moderne pensait avoir trouvé des remèdes à tous les maux ‑ mais, par bonheur il ne l'a pas fait, et il y a une sorte d'optimisme étrange dans ce constat. C'est ce que voulait dire Flannery O'Connor en déclarant: «J'ai très peur que l'auteur de fiction voie dans le fait que nous aurons toujours les pauvres gens avec nous une source de satisfaction car cela signifie, essentiellement, qu'il sera toujours capable de trouver quelqu'un de semblable à lui.»

 

Et aujourd'hui que les relations sociales passent par des interfaces électroniques et des communautés en ligne?

 

Les réseaux sociaux surestiment leur propre importance, sans doute parce qu'ils veulent se vendre. Facebook a beaucoup à voir avec la scène sociale de la première année de lycée. Si vous êtes dans le bon cercle vous pouvez être anxieux, mais vous n?êtes pas malheureux. Si vous n'y êtes pas, vous êtes convaincu de vivre la pire situation qui soit.  Tous ces réseaux sociaux sociaux sont un palliatif, non une solution, et comme beaucoup à palliatifs, ils sont addictifs. Ils vous occupent sans vous nourrir. Pour autant, je ne suis pas contre le numérique en tant que tel ‑ je considère que les e‑books apportea plus de bien que de mal, et qu'ils sont pratiques quand il s'agit de partir en voyage, même si rien ne remplacera l'émotion qu'on a à  de sentir un livre imprimé, à l'ouvrir et le feuilleter.

 

Quelle différence faites‑vous entre l'écriture d'une fiction et celle d'un essai comme La Zone d'inconfort?

 

La Zone d'inconfort est né, entre autres, du fait que j'ava été soumis, avec le succès des Corrections, à une exposition médiatique importante, démesurée même, face laquelle j'étais démuni. Cette période été très dure, très violente pour moi. En écrivant La Zone d'inconfort, j’ai paradoxalement récupéré ma vie privée. Choisissant de l'exposer, j'en ai repris le contrôle... La différence entre un essai et une fiction? Un essai vous emportera pendant quarante‑cinq minutes. Vous n'aurez jamais la même qualité d'identification avec la personne qui écrit qu'avec un personnage imaginaire. C'est un paradoxe, mais c'est ainsi. Le personnage fictif est un médium au sens s rituel, presque surnaturel, entre l'écrivain et le lecteur. Et le fait que ce soit un personnage inventé est cruel. C'est cela même qui rend le processus possible. Ecrire une bonne fiction est immensément difficile, il s'agit d'un défi qui demande un engagement de soi total, investissement de tous les instants, et c'est ce qui importe. Etre vivant, pour moi, cela signifie être en train de travailler sur un roman.

 

Propos recueillis par Minh Iran Huy.

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9 décembre 2011 5 09 /12 /décembre /2011 00:00

« Lire nous rend libres, à condition que nous puissions choisir ce que nous voulons lire et que les livres puissent être imprimés sans commissaires qui les mutilent.

Défendre les droits des livres d'être libres, c'est défendre notre droit d'être des citoyens. »

Mario Vargas Llosa, guérisseur public

ECHO DU  journal  le MONDE

echo

écrit par Florence Noiville

Il appelle ça sa petite "pharmacopée littéraire". Pour Mario Vargas Llosa, la littérature sert à panser. Oui, comme ça, avec un "a". Comme on panse une blessure. Elle soigne, elle calme, elle soulage. Parfois même, elle permet de cicatriser. Tout à la fois pensée et pansement...
Cela vous paraît abstrait ? Le Prix Nobel se met à rire. Renversé dans un canapé de son bel appartement parisien, près de Saint-Sulpice, il raconte comment il en est venu, très concrètement, à cette idée de "livre-médecin". "C'était il y a quelques années, au cours d'un voyage entre Buenos Aires et Madrid, dit-il. A l'aéroport d'Ezeiza, j'avais acheté un ouvrage d'Alejo Carpentier, Le Royaume de ce monde...". A l'époque, Vargas Llosa souffrait d'un mal chronique, la peur de l'avion. Il avait pourtant passé des années à "monter et descendre de ces bolides aériens comme on change de chemise". Mais soudain, allez savoir pourquoi, la sueur froide, la peur. "Et rien qui puisse les combattre, ni le whisky, ni les anxiolytiques, ni les comprimés pour dormir..." Rien sauf, ce jour-là, un Carpentier miraculeusement dosé qui, sans qu'il s'en aperçoive, propulsa son imagination hors de la cabine jusqu'à l'atterrissage. Dans Comment j'ai vaincu ma peur de l'avion (L'Herne, 2009), Vargas Llosa raconte que désormais, pour chaque voyage, il puise dans sa "biblio-apothèque" : un Faulkner pour un long-courrier, un Stevenson pour un vol plus court : avec la bonne posologie, l'effet est immédiat. Sans contre-indication ni effets indésirables.

Qu'en conclut-il ? Que le fait d'absorber de la littérature "agit" sur nous. Sur notre esprit mais aussi, bizarrement, sur notre corps : fini les mains moites et le coeur qui bat en dépit du bon sens (les neurobiologistes spécialistes de la "chimie des émotions" se sont-ils déjà penchés sur cette action inattendue de la littérature ?).....

 LIRE LA SUITE SUR CE LIEN

Le 7 octobre 2010, Vargas Llosa reçoit le prix Nobel de littérature pour « sa cartographie des structures du pouvoir et ses images tranchantes des résistances, révoltes, et défaites individuelles ».

 

  • De Mario Vargas Llosa, signalons aussi, chez Gallimard, Eloge de la lecture et de la fiction
  • LE RÊVE DU CELTE (EL SUEÑO DEL CELTA) de Mario Vargas Llosa. Traduit de l'espagnol (Pérou) par Albert Bensoussan et Anne-Marie Casès. Gallimard, 528 p., 22,90 €.
  • Ce que je sais de Vargas Llosa (François Bourin, 258 p., 19 €)
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